Articles datés du 14 juin 2011

Et oui !!! 43 tribus !!

Donc, si vous avez répondu 42 tribus (soit 73% des participants) à la question pour le concours kikoi et bien, dommage, c’est raté !!! D’ailleurs, le concours est fermé, pas un seul gagnant donc tirage au sort dans la journée…

Car il y a bel et bien 43 tribus au Kenya… la dernière tribu reconnu officiellement par l’administration de Kibaki en 2007 étant les nubiens de Kibera…

Vous pouvez ignorer les 139 pages qui parlent de « 42 tribus » (dont le Petit futé, le Guide du Routard, l’Union africaine,) et saluer les 4 pages qui parlent de « 43 tribus ».

Et voici l’histoire des nubiens… les oubliés du Kenya…

Vers la fin du XIXème siècle, lorsque le Soudan était sous la tutelle anglo-égyptienne, l’armée britannique enrôlait de force les soldats soudanais de la région de Nubia pour l’armée turco-égyptienne. Ces soldats soudanais ont joué pendant des années un rôle très important défendre toute la région de la corne d’Afrique orientale contre les forces allemandes et italiennes installées en Somalie, au Soudan et en Tanzanie… que ce soit durant la première et la deuxième guerre mondiale.

Après une mutinerie en 1897, l’armée anglais a décidé de les ramener au Kenya et de leur attribuer un terrain/camp dans la ville de Nairobi. Ce camp fut appelé par les nubiens « Kibra« , ce qui signifie dans la langue nubi « le pays de la forêt« … En 1955, 3 000 nubiens vivaient à Kibra; et un siècle après, ce lieu –  désormais connu sous le nom de Kibera, un des plus grands bidonvilles d’Afrique – est toujours habité par des nubiens; et l’on compte environ 100 000 nubiens au Kenya.

Les nubiens et Kibera d’avant….
Les nubiens du Kenya (avant)
Les nubiens du Kenya (avant) Les nubiens du Kenya (avant) Les nubiens du Kenya (avant) Les nubiens du Kenya (avant) Les nubiens du Kenya (avant)

Jusqu’à l’indépendance du pays en 1963, les nubiens étaient appelés « personnes sous protection britanniques » mais ils étaient censés recevoir la nationalité kényenne une fois le pays proclamé indépendant et devenir propriétaire du terrain de Kibera. Mais cela n’a pas été le cas et la plupart des nubiens de Kibera se sont trouvés sans nationalité.

Aujourd’hui encore, 50% de la population des nubiens vivent à Kibera, l’autre moitié ayant quitté le bidonville pour vivre dans des villages du Kenya généralement habités principalement par des nubiens. Et parmi les nubiens, beaucoup sont toujours sans nationalité (environ 13% des adultes ou plus) et peinent à obtenir la nationalité kényenne.

Prenons le cas d’Abdulhaleem El-Busaidy: on lui a refusé la nationalité kényenne en 2010 parce qu’il n’avait pas le certificat de naissance de son grand-père. Un officier lui a indiqué qu’à cause de son appartenance ethnique, sa nationalité doit être vérifiée conformément à une circulaire secrète stipulant que:

« Pour les asiatiques et les arabes, un certificat justifiant la nationalité des parents et des grands-parents est nécessaires« .

Cette circulaire, de la section 8 du Registration of Persons Act s’applique encore actuellement pour les populations vivant près des frontières kényennes (comme les somalis, les borans et les gabras) ainsi que des groupes ethniques particuliers (comme les nubiens, les arabes de la côte et les sud-asiatiques).

Une situation pénible pour les nubiens et autres groupes ethniques, pour la plupart musulman, car la majorité doit obtenir les documents souvent inexistants et passer une interview devant des officiers corrompus.

J’ai été voir la personne en charge de la délivrance des cartes d’identité et elle m’a demandé si j’étais musulman et j’ai répondu « Oui » alors elle m’a dit « Ok, nous ne réglons pas les problèmes des musulmans ici »

Depuis que les nubiens ont été reconnus par le Président Kibaki en 2007 comme étant la 43ème tribu officielle du pays, les choses ont quelque peu changé. La plupart d’entre eux ont désormais une carte d’identité mais la discrimination sociale perdure et les nubiens sont toujours marginalisés; 70% des nubiens sont sans travail et seulement 2% des enfants atteignent les études secondaires… et même à Kibera, la communauté nubienne est exclue des projets de réhabilitation urbaine lancé par le Gouvernement kényen et pire encore le gouvernement refuse de leur attribuer les 4 000 hectares de terrain de Kibera.

Les nubiens et Kibera d’après
Les nubiens du Kenya (après)
Les nubiens du Kenya (après) Les nubiens du Kenya (après) Les nubiens du Kenya (après) Les nubiens du Kenya (après) Les nubiens du Kenya (après)

Reférences

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Traduction d’extrait des rapports « Nationality and Discrimination: The Case of Kenyan Nubians« ; « Nubians: Numbers and Voices » et « IslamKenya Bulletin« 

Pour voir toutes les photos du peuple nubien et de Kibera d’avant et d’après, rendez-vous sur le site NubiansinKenya.com, créé par Greg Constantine.

Et ce texte français sur l’apatridie des nubiens du Kenya