Articles datés du 9 décembre 2010

Bizarement, cela plusieurs années que Wikileaks est lié au Kenya… Tout simplement parce que pendant que Julian Assange était caché en Islande, il aimait dire aux journalistes qu’il a passé plusieurs années au Kenya chez un(e) ami(e).

Un gros mensonge bien sûr… Certes, le Kenya a eu la visite des frères Arthur, d’El-Bashir et même peut-être le pays d’accueil de Félicien Kabuga (fugitif rwandais) mais Assange n’a jamais posé les pieds au Kenya !
 

Bon, la grande nouvelle de la journée, ca y est, les premières fuites de Nairobi sont disponibles sur Wikileaks (voir cette page mirroir)

Référence Sujet Classification Origine
08NAIROBI1363 Somalia — Ayrow’s Demise SECRET//NOFORN Embassy Nairobi
08NAIROBI2290 WHITHER M/V FAINA’S TANKS? SECRET//NOFORN Embassy Nairobi
09NAIROBI1057 SOMALIA – TFG PRIME MINISTER WORRIED ABOUT RIVAL SECRET Embassy Nairobi
09NAIROBI1801 SOMALIA – CODEL MARSHALL SCENESETTER: HOW SECRET Embassy Nairobi
09NAIROBI2497 Kenya responds to Sudan tank demarche SECRET//NOFORN Embassy Nairobi
10NAIROBI59 U.S. POLICY TO ADVANCE THE REFORM AGENDA CONFIDENTIAL Embassy Nairobi
10NAIROBI181 Chinese Engagement in Kenya SECRET//NOFORN Embassy Nairobi
06NAIROBI72 S) INTERNATIONAL DRUG TRAFFICKING RING ENJOYS SECRET Embassy Nairobi

Et ce n’est que le début car il y a plus de 1 000 documents concernant le Kenya… Les autres fuites devraient être publiées très prochainement.

Love & Hate
Avant tout, il faut se remettre dans le contexte pour se rendre de l’absurdité des relations entre les États-Unis et le Kenya…

En 2009, dans mon long article « Kenya – États-Unis, une histoire de Love and hate« , on y apprenait que les États-Unis faisaient pression sur le Gouvernement kényen en interdisant de séjour aux États-Unis 15 politiciens kényens; pressions pour le Kenya commence enfin à travailler sur une nouvelle constitution.

Et en juin 2010, peu après l’interview de Barack Obama sur une télévision kényenne et le discours de Joe Biden en visite à Nairobi, les États-Unis ont tout fait pour que le OUI sorte gagnant du référendum sur la nouvelle constitution, cette fois-ci en menaçant de punir les politiciens qui sont opposés à cette réforme.

Pas de doute, cette relation de Love & Hate perdure car il y a à peine trois semaines, les États-Unis ont de nouveau annoncé que quatre politiciens et un homme d’affaire étaient interdits de séjour aux États-Unis pour des histoires de trafic de drogues dures à Mombasa et Malindi…. Et encore une fois, merci à eux, aucun nom n’a été divulgué; laissant ainsi les kényens dans la perplexité totale.

Pour parler pour ne rien dire, autant cracher le morceau ??

Wikileaks crache le morceau avant tout le monde !!
Kibaki a demandé à ce qu’une enquête soit effectuée pour pouvoir rendre public les noms des politiciens qui s’enrichissent en trafiquant de la cocaïne et de l’héroïne…

Et quelques jours après, peu avant les premières fuites de Wikileaks, l’Ambassadeur des États-Unis au Kenya a rendu visite – la queue entre les jambes – au Président Mwai Kibaki pour s’excuser en avance de toutes révélations et informations qui seraient divulguées par Wikileaks.

C’est quand même comique, cette petite danse diplomatique !!! « Je dis mais je ne dis rien; je dis rien mais je m’excuse de ce qui pourrait être dit »
 

C’est Le Monde qui a écrit un article ce matin sur les barons de la drogue au Kenya car une fuite de Wikileaks nous apprend aujourd’hui que les États-Unis suivaient cette affaire de drogue depuis 2004, et l’article continue en disant que la situation ne s’est pas améliorée puisque même le système judiciaire est sous l’emprise des barons.

Les gangs internationaux de trafiquants de drogue bénéficient de l’impunité au Kenya.

Des preuves ont été enterrées

Il y a des raisons de s’inquiéter de ce que le gouvernement kenyan et/ou des responsables de la police soit protègent ceux qui sont impliqués, soit sont eux-mêmes impliqués dans le trafic de drogue. »

Pour les curieux, quelques noms sont ressortis grâce à Wikileaks, dont celui d’un député.

Among them: four brothers of (known thug and rich-far-beyond-visible-means)
Juja MP William Kabogo, who is also owner of a port container transshipment company.

Mais malheureusement, je vais devoir me taire car, même Kumekucha a reçu des menaces de mort après avoir essayé de découvrir la vérité. Ca pue grave !!

Les autres fuites !!
Oh, je ne vais pas m’attarder là-dessus car il y aura plein d’articles de presse sur ce sujet et puis les articles politiques sont long et pénibles à lire, alors autant faire court. En gros:

  • La corruption au Kenya va faire plonger le pays vers de plus grandes violences en décembre 2012 (date de la prochaine élection)
  • Les États-Unis surveille de près l’invasion de l’Afrique par la Chine ainsi que les méthodes peu diplomatiques utilisées par la Chine – fourniture d’armement au Kenya et de services pour soutenir la position du Kenya face au problème somalien, travaille avec le service secret kényen, corruption à grande échelle, fourniture de pot-de-vin pour obtenir certains marchés, contrebande ivoire, etc….

http://www.lemonde.fr/international/article/2010/12/08/wikileaks-la-chine-en-afrique-une-menace-pour-les-interets-americains_1450871_3210.html

http://www.guardian.co.uk/world/2010/dec/08/wikileaks-cables-kenya-violence-china

http://www.capitalfm.co.ke/news/Kenyanews/WikiLeaks-cable-slams-Kibaki-and-Raila.html

http://www.capitalfm.co.ke/news/Kenyanews/WikiLeaks-reveals-China%92s-support-for-Kenya-intelligence.html

La semaine dernière, pour la Journée international de lutte contre le SIDA, le blog Hakuna Matata mentionnait un article qu’elle a rédigé pour le journal La Croix; article  qui se félicitait, entre autres, de la disponibilité des rétroviraux à bas prix au Kenya. L’article finit par:

« Au Kenya, les trithérapies sont désormais gratuites et accessibles à tous.« 

Alors je n’ai pas hésité à y laisser mon petit commentaire pour rappeler aux gens que si les rétroviraux sont disponibles à bas prix au Kenya et en Afrique, c’est surtout en premier lieu grâce aux pays en développement qui ne plient pas sous la pression des laboratoires pharmaceutiques… et que, consécutivement, cette disponibilité n’est qu’éphémère et ne va pas durer !! Voici mon commentaire :

Pour ma part, ravi que la trithérapie soit enfin gratuite, après tant d’années d’effort (le Kenya était un des premiers pays à disposer des trithérapies à moindre coût venant de l’Inde, avant que la Commission européenne est jugé cela illégale et ait demandé à l’Inde d’arrêter d’en produire en contre partie de son intégration dans l’OECDE – cela date de 2006 – http://www.kenya-tanzanie.com/forum/forum_3.php?msg=8798&return=11).

Comme vous pouvez le voir sur ce commentaire, en 2006 l’Inde avait déjà arrêté l’exportation de médicaments après sont intégration dans l’OCDE et l’ouverture des marchés européens de logiciel informatiques.

Et j’avais déjà poussé plusieurs coups de gueule sur le forum de France 2 après la diffusion d’un reportage honteux sur Envoyé Spécial en 2006 sur les ravages du SIDA avec Emannuelle Béart, alors représentante de l’UNICEF.  Honteux, car le reportage laissait sous-entendre que si les gens souffraient du SIDA au Kenya, c’était en premier lieu à cause du Gouvernement qui ne faisait rien pour les aider, alors que le Kenya était un des premiers pays africains à importer illégalement des médicaments d’Inde (avec l’Afrique du Sud).

Pour une spéciale SIDACTION, c’est bien tristre d’entendre de si grands mensonges de la part d’une émission de reportage comme Envoyé Spécial réputée être pertinente.  J’espère que l’erreur sera corrigé dans le prochain Envoyé Spécial et que vous direz enfin la vérité aux téléspectateurs français et européens!!!!

1/  Certes, il y a eu pendant les années Moi (jusqu’en 2001), un manque de volonté du Gouvernement kenyan pour lutter contre le SIDA, le Président Moi était totalement opposé à l’usage du préservatif et il n’hésitait pas à le dire.   Mais depuis que le Président Kibaki est au gouvernement, première élection démocratique au Kenya, de nombreuses campagnes publicitaires ont été lancées pour sensibiliser le public Kenya, surtout grâce à la campagne américaine de sensibilisation menée en Afrique et communément appelée (ABCD – abstinence, be faithful, condom, depistage – bien que l’on parle plus d’abstinence que de préservatifs).  Beaucoup a été fait par le Gouvernement kenyan (ouverture de centre dépistage gratuit, reportages  télé et radio, conférences) même jusqu’à autoriser l’import de médicaments génériques malgré les difficultés juridiques que cela engendre au niveau international.  Le Kenya était d’ailleurs l’un des premiers pays d’Afrique a avoir autorisé l’importation de médicaments d’Inde (il faut savoir que le Kenya est une ancienne colonie britannique et que la population indienne est largement représentée au Kenya). Dire que le Gouvernement kenyan n’a rien fait ou ne fait rien pour les malades du SIDA au Kenya est pur mensonge.

Et puis, j’ai réitéré mon coup de gueule sur Peperuka en 2009, après que le Président de SIDACTION ait fait une remarque à propos des dons pour le Téléthon. J’avais répondu que donner de l’argent au 110 ne sert à rien, également

La triste nouvelle est que l’Afrique subsaharienne est la partie du monde la plus touchée par le SIDA.  Hier, dans le Grand Journal de Denisot, une carte mondiale montrait qu’il y avait une prévalence du VIH de 22% en Afrique, et personne ne commente…

[…] Alors qu’en France, le Président de SIDACTION dit que 100 millions d’euro pour le Téléthon c’est trop (ce que je pense également) pour nous rappeler qu’il y a aussi le VIH/SIDA;  j’en profite pour rappeler au Président de SIDACTION, premièrement, qu’il y a aussi le paludisme/malaria et que, deuxièmement, donner de l’argent au 110 ne sert à rien aussi, puisqu’en gros vous donnez de l’argent aux compagnies pharmaceutiques et laboratoires de recherche, les mêmes qui manipulent l’UE et l’OMC pour mettre le couteau à la gorge des pays africains, une vérité souvent cachée.  Alors pourquoi donner de l’argent au 110 ??  Pendant que les laboratoires s’en foutent plein les poches, des enfants en Afrique meurent encore de maladies bénignes.

Et, encore une fois, l’Union Européenne est convenu la semaine dernière à un accord avec l’Inde pour arrêter la production de trithérapie en Inde et l’exportation de ces médicaments génériques dans les pays pauvres pour la somme modeste de 70 USD par an – contre 500 USD auparavant !!

[Traduction rapide d’un article de presse en anglais]
La production de médicaments génériques en Inde, en place depuis 2005, pourrait s’arrêter car l’Inde n’a toujours pas les brevets nécessaires pour les produire.

Et pourtant, en 2005, l’Organisation mondiale du commerce et des propriétés intellectuelles avait obligé l’Inde a racheté les brevets. Toutefois, il y a de forte chance qu’un accord soit convenu entre l’Union européenne et l’Inde afin de mettre fin à la production de médicaments génériques en Inde et, consécutivement, l’arrêt total de l’exportation de ces médicaments dans les pays pauvres. D’autres consultations auront lieu cette semaine et la semaine prochaine entre l’Inde et l’Union européenne pour arriver à un accord final.

Les compagnies pharmaceutiques ont perpetué leur lobbying en mettant en avant une clause mentionnant le terme « données exclusive » pour empêcher l’Inde de produire des copies de médicaments produits en Europe, même ceux qui n’ont pas encore été brevetés. Cette mesure entraînera la montée des prix des traitements et retardera surtout la disponibilité des nouveaux médicaments pour les enfants (moins de 15 ans).

La représentante de l’Union européenne a nié que cet accord aurait pour effet d’empêcher la distribution de médicaments peu coûteux chez les populations pauvres. Mais Médecins Sans Frontières pensent le contraire et le Secrétaire anglais de UK International Development a annoncé qu’il essaierait de discuter avec les représentants de l’Union européenne.

Et je pose alors toujours la même question:
Quelle a été la position de la France ? Mme Lagarde a-t-elle de nouveau soutenu les laboratoires pharmaceutiques, pour qui elle a travaillé longtemps aux États-Unis ? Ces mêmes laboratoires qui s’en sont mis plein les poches avec le H1N1.

Alors fier d’être européen et français et de laisser les gens mourir du SIDA pour une question de brevets ??

C’est triste à dire mais des fois on peut s’autoriser à penser (dixit Coluche) « Vivement que le paludisme arrive en France !!« 

Ah oui, une grande manifestation est organisée aujourd’hui à Nairobi pour défendre la production et l’importation de médicament trithérapeutiques génériques !!  Et c’est BBC Africa qui a relayé l’information !