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Cela fait bientôt 15 ans que je vis à Nairobi et comme beaucoup d’autres français, je passe tous les jours au croisement du Yaya Centre, celui qui relit Ring Road à Argwings Kodhek* (un des noms de rue les plus difficile à écrire du Kenya d’ailleurs).

Un croisement que beaucoup d’entre nous détestent car il est constamment encombré et bourré de trous !

Et il suffit d’un moindre petit bouchon pour que bus, matatus et voitures particulières (ceux qui prônent l’impunité, karibu kenya) déboitent, doublent et utilisent les voies secondaires (passage par la station essence, double voies, etc.) ou à contre-sens pour engendrer chaos et zizanie !!

Et bien, si comme moi vous passez par ce croisement de fous, vous avez surement remarqué quelques peintures sur pierre disposées en ligne le long de la route, les bosquets, les monticules de boues et les tranchées creusées par le City Council; et derrière ces peintures… un petit groupe de chokora** qui passe sa journée assis dans la boue entourés de plusieurs laveurs de voiture de rue !

À force de passer par là tous les jours, ces peintures font parti petit à petit de votre quotidien, tout comme une oeuvre accrochée chez vous !! Pour ma part, j’ai toujours été intrigué de savoir qui se cachait derrière ces peintures…

Une personne sur un forum sur l’art de rue (le vrai (ou le faux) streetart) a annoncé qu’il organisait un petit concours et donnerait un prix à celui qui a fait une bonne action directe dans le mois. Après voir lu cela, je me suis dit pourquoi ne pas rendre visite à ce peintre de rue et faire découvrir une facette de la vie du Kenya aux membres du forum !

Alors, me voilà, débarquant avec ma voiture, Lee Perry en fond sonore… À peine garé, les gens viennent me voir; ils apprécient la musique, on se fait plusieurs saluts africain/rasta (tapage du poing et coup d’épaule) puis je m’enquiers sur l’identité du peintre !

J’ai passé quelques minutes à discuter avec Topher Kavuli… Agé de 38 ans, il vit dans la rue comme les autres… mais au lieu de mendier ou de voler, il passe sa journée près de ses peintures à attendre des commandes… il m’a avoué il ne vend pas grand chose !!

Lorsque je lui ai dis que cela fait des années que je passe devant ses peintures (comme des milliers d’autres), il a rigolé et m’a dit « oui cela fait des années que je perd mon temps« , cela en dit long sur l’humour et la gentillesse de Topher.

Je lui ai ensuite fait remarquer qu’il y a de plus en plus de gens intéressés par l’art africain et l’art de rue et lui ai dont demandé pourquoi, après tant d’années, il n’a pas rejoins un groupe d’artistes, comme celui de Maasai Mbili composés d’artistes vivant dans les bidonvilles… Sa réponse a été vague, il va de temps en temps au Kuona Trust pour chercher de la peinture et des pinceaux ou s’inspirer, mais il préfère être dans la rue, dans son petit monde entouré d’amis qui vivent également dans la rue.

À ma question, s’il avait déjà peint sur canevas ou s’il a déjà été commissionné par un galeriste ou amateur d’art, il m’a répondu que non… Que seulement une personne, Frank Whalley de Lenga Juu, un spécialiste de l’art kényen qui rédige pas mal d’articles de presse sur l’art africaine, avait écrit une colonne sur lui en 2009 dans le EastAfrican (ci-dessous)

Bon, il y avait les enfants qui m’attendaient dans la voiture (sous la surveillance des laveurs) alors je n’ai pas trop trainé !  Je lui ai demandé si je pouvais prendre une photo, ce qu’il a accepté si je lui amène un ou deux tirages. Du coup, je suis resté sur ma fin et je compte bien le revoir prochainement (déjà pour donner les photos).

Mais en partant, je me suis dit que cela serait marrant d’organiser une commande pour lui sur canevas. Du coup, je fais continuer l’appel au good karma lancé dans le forum, et peut-être qu’une ou deux – ou même plusieurs – personnes du forum accepteraient de mettre 30 euros pour avoir un petit canevas peint par Topher (cela changera de McLevey), envoyé par mes soins… Et si ces peintures plaisent vraiment, alors espérons qu’il ait plein de commandes, assez pour sortir de la catégorie des gens qui vivent avec moins d’un dollar par jour.

Pour ma part, j’ai pris deux pièces, le « No Small King«  (1200 Kshs) et le « Coexist » (800 ksh). Et si vous passez par là, alors n’hésitez pas à parler à Topher !!

La piève que je voulais avait été effacé part Topher, alors je lui ai redemandé de me refaire un « No Small King« …  On a bien ri !! Le « no small king » ne fume que des « king size » !!

Et le « Coexist » était bien abimé alors il a refait le fond et les lettres !

Et oui, j’irai surement de nouveau acheter quelques pierres peintes dans le courant de l’année pour notre terrasse !! Et vernir celles-ci !!

(suite…)

Les graffitis de Nairobi en live !

Partage

NTV a diffusé hier dans son émission TheHeadliner une reportage de 7 minutes sur le groupe derrière les graffitis protestataires de Nairobi !

On reconnait bien Boniface Mwangi sur la vidéo… Remarquez aussi l’usage d’un générateur qui alime un ordinateur et un projecteur, ce dernier permet de reproduire le dessin sur le mur pour faciliter le travail !!

Enfin, comme beaucoup d’artistes graffitis en Europe, chaque personne du groupe porte des vestes fluo – comme ceux portés par les travailleurs municipaux – et ils ont même utilisés des cones de signalisation pour barrer la route
 

Malheureusement, le reportage se finit par un message fort : le graffiti est illégal et toute personne prise en train de taguer/peindre un mur sera immédiatement arrêtée !!
 

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Mise à jour (23/3/2012) : il y a du nouveau dans l’affaire des graffitis de Nairobi !!

  • On a demandé à Boniface Mwangi de se présenter à la police de Nairobi pour rencontre le Chef de la police de Nairobi, Eric Mugambi ! Ce n’est pas bon signe !
  • Un article a été publié aujourd’hui dans le Guardian et au sixième paragraphe, quelques nouveaux noms apparaissent – Uhuru B, Swift, Smokillah, Bankslave. Je disais dans mon précédent article « Le graffiti qui tue » que Spray Uzi était derrière cela et j’avais raison !!!
  • Et, d’après le Star, Waititu risque d’être prochainement arrêté par la police  à cause de graffitis « Waititu 4 Governor » tagués sur les murs de Nairobi !

Le vent tourne !!

Fait ce week-end sur Koinange street mais déjà repeint par le City Council ce matin même !!  Par contre, les deux autres sont toujours là !!

Credit Photo: Andre Epstein (après ne me dites pas qu’il n’y a pas une German Connection derrière tout cela)

Et la photo de Boniface Mwangi montrant les « kanjos » repeignant les toilettes publics est ici

L’art de rue, connu sous le nom de graffiti, prend de l’ampleur au Kenya !!
Et oui, on avait déjà eu droit à une séance de breakdancing et au premier flashmob au Kenya, et bien voilà qu’un mur de la ville de Nairobi a été décoré de son premier vrai graffiti, un graffiti protestataire en plus  !!

Mais vous aviez surement remarqué qu’il y a de plus en plus de graffitis à Nairobi; la plupart d’entre eux mentionnant des candidats à la prochaine élection, dont ceux de Uhuru Kenyatta ou de Mwai Kibaki, ou des héros de la nation comme Wangari Maathai.

Cette montée en popularité des graffitis peut être expliquée par deux facteurs : la construction de la rocade à Nairobi – et par conséquence, de nombreux ponts, tunnels, murs, etc. – et le début de la campagne pour les prochaines élections présidentielles.

À ma connaissance, il y avait très peu de graffitis/tags protestataires au Kenya; les seuls que je connaisse étaient ceux de Solomon Muyundo, aka SOLO 7, qui avait taggué les murs et tôles ondulées de Kibera de messages appelant à la paix alors qe les autres s’entretuaient.

Grâce à son acte et son projet Art4Peace, SOLO 7 et la poignée d’artistes travaillant à l‘atelier de Kibera Maasai Mbili sont devenus très populaires dans le milieu artistique kényen…

D’ailleurs, l’atelier Maasai Mbili est désormais un des endroits à voir lorsque l’on visite la périphérie de Kibera; et les artistes y travaillant ont reçu des fonds de diverses ambassades et des projets culturels ont été élaborés pour promouvoir leur travail !

Pour en savoir plus, vous pouvez toujours lire une interview/présentation de SOLO 7 ou visiter la page Facebook de l’atelier Maasai Mbili ou au Rustique entre le 2 mars et le 4 avril 2012 !!

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Nous sommes allés se balader en ville samedi dernier pour y acheter des tissus à Biashara Street et du crabe/thon au City Market lorsqu’à ma grande surprise j’aperçois le mur de Muindi Mbingu Street décoré d’un immense graffiti !!

Ce mur m’a toujours intrigué car il est resté pendant des années dénudé, avec la peinture qui tombe et certaines briques apparents… et, étrangement, il borde un square/parc bétonné protégé par des barrières…

En fait à chaque que je passais par là, je ne pouvais m’empêcher de penser à l’artiste Vhils qui décore les murs à travers le monde en les martelant et les grattant. Bref, ce mur de Muindi Mbingu Street était parfait support pour l’artiste Vhils (voir photo au dessus) !

Mais non, c’est un groupe de jeunes activistes kényens qui a en premier eu le courage de peindre ce long mur dénudé pour passer un message fort aux politiciens kényens !!




En grand format : Photo 1, 2, 3 et 4

Et la question que tout le monde se pose, qui est derrière cette acte de protestation unique en son genre ??
Et bien, il semblerait, d’après un article rédigé sur le site Vice.com, que le commanditaire de ce graffiti est le photojournaliste Boniface Mwangi

Boniface MwangiJ’ai parlé plusieurs fois de Boniface Mwangi sur ce blog et sur notre page Facebook. Boniface est pour moi est un des activistes les plus importants de cette jeune génération de kényens, un héro de la nation. Nommé meilleur photo-journaliste africain de l’année 2008 et 2010 par CNN, il a notamment interrompu le speech du président Kibaki en 2009 et accusé plusieurs fois les politiciens de criminels sur les différents réseaux sociaux… mais c’est  surtout son projet Picha Mtaani qui a dérangé le plus. En effet, Boniface a exposé ses photos des conflits électoraux dans plusieurs villes du Kenya (souvent sans autorisation) pour que la population n’oublie jamais les cruautés commises en 2008 !!

Pour voir les vidéos de Boniface Mwangi ainsi que tous les liens Internet vers ses sites personnels et projets, je vous recommande de lire Pour ne pas oublier publié en avril 2011 (attention, âmes sensibles s’abstenir).

Les graffitistes de Nairobi ??
Vous l’aurez bien compris, ce n’est pas Boniface qui a sprayé ce long mur de 10 mètres… Boniface n’est juste que le cerveau de cette opération, il s’est occupé de l’organisation comme fournir le matériel pour les taggeurs, les spots lumineux pour éclairer le mur et même la présence d’officier de police pour assurer la sécurité.

Alors qui a exécuté le graffiti ? L’article de Vice parle d’un artiste allemand, Markus Quinting, aka Tona, vivant à Nairobi et « connu de la police allemande pour avoir été sous écoute » (très surprenant). C’est surement cet artiste qui a effectué le vautour tandis que d’autres taggeurs kényens – surement des membres de Spray Uzi et/ou de Pawa254, le dernier bébé de Boniface – se sont occupés des textes.

Et, et… Il y a un deuxième graffiti sur Kenyatta Avenue près de Gulf African bank/ICEA building que Boniface a pris en photo et posté sur son compte Twitter.

Ce graffiti appelle les jeunes à une révolution pacifique à l’aide de leur bulletin de vote, « c’est maintenant » (ni wakati en swahili)

Et ensuite ??
En tout cas, pas de doute, Boniface Mwangi et son nouveau hub d’artistes Pawa 254 – dont les bureaux sont situés à quelques mètres de State House – nous préparent encore beaucoup de choses !! Il faut du courage pour faire ce qu’ils font et, comme le dit Boniface, « au pire ils vont juste nous arrêter« … certes, mais pour Tona l’allemand, le pire est qu’il soit expulsé du pays, non ??

Et encore plus surprenant, deux/trois semaines après, le graffiti est toujours là ???

Je voulais un Fairey et c’est fait ! Et oui, j’ai trouvé celui sur le marché secondaire à un prix plus que raisonnable…
 

Il est signé par Shepard Fairey mais aussi par Martha Cooper et Cope 2 !!
Et ci-dessous la vidéo du mur…

Et oui, un jour, il faudra bien que j’amène ma collection d’art urbain au Musée d’art moderne (MOMA) MOMA de Nairobi… Il ne manque plus qu’un Banksy et un maçon pour monter de nouveaux murs !!

Faut-il vraiment présenter Shepard Fairey  ?
C’est tout simplement un des plus connus et des plus influents artistes de l’art urbain du moment.

Né en 1970, l’américain Shepard Fairey est issu de la génération « skateboard » et il a commencé vers la fin des années 80 à coller des autocollants représentant un catcheur, André, sur les skateboards et dans la rue.

Son personnage André est très vite devenu viral et ses autocollants sont devenus très populaires dans la rue; l’image d’André intriguait les gens… Devant ce succès, Fairey a lancé sa campagne de marketing, en créant le label ObeyGiant, et a commencé à vendre des T-shirts, autocollants, posters, etc.

Mais Fairey a connu son heure de gloire et est devenu mondialement célère en créant le poster HOPE de la campagne de Barack Obama. Cette image restera une image iconique de l’époque Obama; d’ailleurs, en janvier 2009, l’original du portrait a été ajouté à la collection permanente du US National Portrait Gallery.

Fairey – et son label ObeyGiant – continue toujours à peindre des murs, coller des papiers, produire des posters, etc.. et de temps en temps, ses dessins font la une du Time. D’ailleurs, beaucoup le détestent pour cela, un trop plein de merchandising

Ses lithos – deux ou trois tirages de 350 par mois – se vendent comme des petits pains et généralement en moins de 2 minutes (si le site ne plante pas). Le petit prix (45 à 60 USD) explique ceci; Fairey est adoré par les revendeurs Ebay (les « flippers » – qui généralement les revendent sur Ebay double prix.

Et le 4 mars prochain, Shepard Fairey sera l’invité dans un épisode des Simpsons intitulé « Exit Though The Kwik-E-Mart« … avec également trois autres artistes, Ron English, Kenny Scharf et Robbie Conal.



Shepard Fairey est-il millionaire ? On pourrait le penser, surtout si l’on sait qu’il a vendu plus d’un million de poster Hope lors de la campagne d’Obama mais dans sa dernière interview, il dit bizarrement le contraire :

« En fait, j’ai perdu beaucoup d’argent en faisant de l’art de rue mais je peux me permettre de financer des projets ambitieux dans la rue en vendant des posters et des oeuvres d’art. L’art de rue est gratuit pour le public, mais cher pour les artistes.« 

Pour plus d’info sur Fairey, allez voir Wikipédia ! Et pour rire, cette courte vidéo de Fairey qui tue sa femme avec ses yeux lorsqu’elle dit que « Shepard ne va plus dans la rue »
 

Et Martha Cooper ?
Martha Cooper est une photographe américaine née dans les années 40. Elle a passé plus deux décennies à photographier les scènes hip-hop et graffiti de New York dans les années 70 et 80…

Martha Cooper a photographié les plus grands, de  Basquiat à Keith Haring…

Et sa photo la plus connue, celle du garçon pointant du doigt et portant sa boombox (repris dans notre 100ème et dernier collage).

Vous pouvez voir quelques-unes de ses photos sur son site nycitysnaps

Et Cope 2 ?
Cope 2 est un pionnier du graffiti… Il est surtout connu pour ses « throw-ups » mais il est également reconnu pour être un des maîtres du « wildstyle« , style originaire du Bronx.

Cope2 est resté très discret mais il a, depuis 2000, décidé de retourner sur la scène artistique et cela a bien fonctionné : les oeuvres originales de Cope 2 se vend très bien, que ce soit à New York ou au ArtCurial de Paris.

D’ailleurs, Cope2 sera à Paris cette semaine pour une expo solo à la gallerie Magmoth et il était hier au ArtCurial
Cope 2 sur Wikipedia